À en croire un document publié ce mercredi 19 juin 2024, la Députée Nationale MUTITA KALUNGA CLOTILDE a déposé une motion d’information au bureau de l’Assemblée Nationale, dans l’optique d’exprimer son indignation sur l’opération d’interpellation des jeunes désœuvrés dans la ville de Lubumbashi, chef-lieu de la province du Haut-Katanga.
L’élue de Lubumbashi note que la police nationale avait fait savoir dans son communiqué adressé à l’autorité urbaine, qu’elle procédera à l’interpellation uniquement des jeunes désœuvrés, délinquants, communément appelé Sheguey.
CLOTILDE MUTITA KALUNGA indique que curieusement, l’opération vise maintenant les personnes non délinquantes, tout en dénonçant également les dérapages qui s’observent.
Face à cette situation, cette élue du peuple qu’il s’agit de la violation manifeste des dispositions légales notamment l’article 17 et 18 de la loi fondamentale, garantissant la liberté individuelle.
Ci-dessus les détails de la motion d’information de la députée nationale du parti Ensemble pour la République :
Avec la situation actuelle qui sévit dans notre pays d’une manière générale et à l’Est du pays en particulier, suite à la guerre d’agression, cela ne nous paraît pas aisé de prendre directement la parole du haut de la tribune de l’hémicycle de l’Assemblée nationale pour ne pas augmenter la psychose dans la population qui vit déjà dans l’insécurité et la misère qui ne dit pas son nom, à travers le pays et particulièrement dans la ville de Lubumbashi, mon fief électoral.
Nous optons de déposer notre motion d’information à vos services. Nous tirons la sonnette d’alarme, suite à la situation qui prévaut actuellement dans la ville de Lubumbashi, chef-lieu de la province du Haut-Katanga fin d’indignation et de clarification sur les faits avérés. Depuis quelques jours, la police nationale congolaise avait dans son communiqué, adressé à l’autorité urbaine, qu’elle procédera à l’interpellation uniquement des jeunes désœuvrés, délinquants, communément appelé Sheguey à Lubumbashi. Le seul motif retenu à leur égard : l’apparence physique désagréable. En outre, l’opération vise à les acheminer dans la province du Haut-Lomami au centre d’encadrement professionnel de Kaniama-Kasese.
Curieusement au fur et à mesure, l’opération va non seulement viser les personnes non délinquantes mais même le motif ne serait plus le même, beaucoup de dérapages s’observent à cet effet. À titre exemplatif, des jeunes ayant parfois de longs cheveux, des dreadlocks et parfois même des jeunes gens ayant des petits boulots notamment des laveurs de véhicule, des marchands ambulants, des receveurs des véhicules des transports en commun, des mécaniciens, des élèves et autres. Il faut souligner que même les jeunes étudiants ont été également inquiétés par cette mesure aux alentours même des cités universitaires. Cas d’un journaliste et directeur général d’un média de Kinshasa, revenant de la journée minière organisée à Lubumbashi à l’hôtel Karavia après l’avoir arrêté, dépouillé et découvert probablement qu’il était journaliste, ce dernier fut relâché.
Face à cette situation que nous qualifions d’arrestation purement arbitraire, nous pensons qu’il s’agit là d’une violation manifeste des dispositions légales notamment l’article 17 et 18 de la loi fondamentale qui dispose respectivement que : la liberté individuelle est garantie, elle est la règle la détention, l’exception, nul ne peut être poursuivi, arrêté, détenu ou condamné qu’en vertu de la loi et dans les formes qu’elle prescrit.
Toute personne arrêtée doit être immédiatement informée des motifs de son arrestation et toute accusation portée contre elle et ce dans la langue qu’elle comprend. Elle doit être immédiatement informée de ses droits. La personne gardée à vue doit être immédiatement en contact avec sa famille ou avec son conseil. La garde à vue ne peut excéder 48 heures. À l’expiration de ce délai, la personne gardée à vue doit être relâchée ou mise à la disposition de l’autorité judiciaire compétente. Tout détenu doit bénéficier d’un traitement qui préserve sa vie, sa santé physique et mentale ainsi que sa dignité.
Mais aussi la violation des conventions internationales en matière de droit de l’homme, à l’instar de la charte africaine des droits de l’homme et des peuples en son article 6 qui dispose que : tout individu a droit à la liberté et à la sécurité de sa personne nul ne peut être privé de sa liberté, sauf pour des motifs de conditions préalablement déterminés par la loi ; En particulier nul ne peut être arrêté, ni détenu arbitrairement.
Pour toutes ces raisons, nous estimons que cette opération viole intentionnellement la loi suprême de la république. Déjà la première vague avait quitté Lubumbashi l’après-midi du jeudi 6 juin 2024, environ 350 jeunes désœuvrés ont embarqué à l’aéroport international de la Luano. C’était en présence du ministre provincial de l’intérieur du Haut-Katanga, Héritier Kyungu et du commissaire provincial de la police nationale congolaise Odimba Okito. (Source : presse locale)
QUESTIONS À CONSIDÉRER :
- C’est quoi la mission ? Nous exigeons de savoir quelle est la véritable mission de cette opération. Est-elle réellement destinée à réhabiliter les jeunes ou cache-t-elle d’autres intentions ?
- De qui vient l’ordre ? Il est crucial de connaître l’origine de cette directive. Qui a donné l’ordre d’exécuter cette opération et dans quel but précis ?
- Par qui est-elle exécutée ? Quels sont les corps ou les personnes chargées de la mise en œuvre de cette opération ? Quelle est leur légitimité et quelles sont leurs instructions ?
- Pour quelles fins ? Quel est le but ultime de cette opération ? Est-ce une mesure de sécurité, une initiative de réhabilitation, ou y a-t-il d’autres motifs sous-jacents ?
- Où sont réellement envoyés ces jeunes ? Nous demandons des clarifications sur le lieu de destination de ces jeunes. Le centre d’encadrement professionnel de Kaniama-Kasese est-il réellement équipé pour les accueillir et leur offrir un avenir meilleur ?
- La relation entre la coiffure et le fait d’être un délinquant ? Comment justifie-t-on l’arrestation de jeunes et d’adultes en fonction de la longueur de leurs cheveux ? Quel est le lien entre la coiffure d’une personne et son potentiel de délinquance ? Ou peut-être que ce serait une certaine discrimination honteuse sur l’apparence, qui était son nom?
- Pourquoi entretenir un flou autour de cette mission ? Pourquoi y a-t-il un manque de transparence et des informations contradictoires sur cette opération ? Que cache ce flou ? Ces questions nécessitent des réponses claires et immédiates pour rétablir la confiance Enfin, j’aimerais adresser un message et aussi faire une interpellation : ● Aux Jeunes :
Ne restez pas silencieux face à cette injustice flagrante qui déstabilise nos familles. Votre force réside dans votre unité et votre détermination à défendre vos droits fondamentaux. Mais que tout se fasse dans la paix et le respect de la loi et des droits des autres. Toute violence se retournera contre vous. Ne laissez pas la peur vous paralyser, mais plutôt laissez-la vous motiver à vous lever et à résister contre l’abus. Vous méritez d’être traités avec dignité et respect, et vous avez le droit de vivre en sécurité dans votre pays. Ensemble, vous serez plus forts.
● Aux députés nationaux :
Vous avez le devoir de représenter et de défendre les intérêts de vos concitoyens. Il est temps de faire entendre la voix des personnes qui sont victimes de cette opération de ramassage abusif. Vous avez le pouvoir d’interpeller les autorités compétentes, de demander des comptes sur cette opération et de garantir que les droits fondamentaux de tous les citoyens soient respectés. Ne restez pas indifférents à cette situation.
● À l’armée et à la police :
Il est de votre devoir de défendre, protéger et servir la population, pas de la terroriser. Cette opération de ramassage est contraire aux valeurs de la sécurité publique et de la justice. Nous vous demandons de clarifier le but et les méthodes de cette opération, et de vous assurer que tous les citoyens sont traités avec respect et dignité. Vous avez le pouvoir et la responsabilité de refuser de participer à des actions contraires à l’éthique et à la loi. Faites preuve de discernement et de compassion dans l’exercice de vos fonctions, et veillez à ce que la force ne soit utilisée que lorsque cela est strictement nécessaire et proportionné.
● Au gouvernement :
Il est impérieux de fournir des explications claires et transparentes sur cette opération, qu’elle soit menée à Lubumbashi ou ailleurs. Il est impératif que vous respectiez les principes démocratiques et les droits de l’homme dans toutes vos actions. Nous exigeons que vous mettiez fin à cette opération illégale et que vous veilliez à ce que les responsables soient tenus de rendre des comptes pour leurs actes. Vous avez le devoir de protéger et de promouvoir les droits de tous les citoyens, sans discrimination ni peur.
L’initiative paraît salutaire voire salvatrice. Toutefois, pour toutes ces raisons évoquées précédemment, nous estimons que les dérapages constatés à l’issue de cette opération Kaniama-Kasese, violent intentionnellement et manifestement la loi suprême de la république, à travers et par vous, honorable président. Nous voulons avoir les explications et clarifications sur ladite opération.
HERVÉ KABWATILA