Le gouverneur militaire de l’Ituri, le Lieutenant-Général Johnny Luboya Nkashama, est monté au créneau pour dénoncer l’opacité dans la gestion des fonds alloués, notamment, à la ration des militaires engagés sur les lignes de front dans le cadre des opérations en cours dans cette province, placée sous état de siège depuis mai 2021.
Commandant des opérations militaires de cette région, le Lieutenant-Général Luboya souligne que cette situation a un impact négatif sur les militaires, qui manquent même de nourriture.
« Aujourd’hui, nos militaires n’ont de quoi se nourrir que pendant 15 jours. Ils survivent avec cette ration limitée. Allez donc au ministère et demandez combien d’argent est réellement alloué pour les vivres. Les fonds ont été quadruplés, mais les militaires devraient avoir trois repas par jour… Quand les militaires ne sont pas payés, le grand public pense que c’est de la responsabilité du gouverneur, alors que je ne fais pas partie de cette chaîne. Je suis ici pour gérer les opérations, représentant l’armée. Mon rôle est de garantir la mise en œuvre des actions, c’est-à-dire du combat et des opérations militaires », a déclaré le gouverneur de l’Ituri, précisant que cette question relève principalement de la logistique et de l’administration.
Le Lieutenant-Général Nkashama a également critiqué la mesure de l’inspectorat général des FARDC, qui consiste à suspendre temporairement les soldes des veuves de soldats décédés lors des combats.
Dans une interview accordée à la presse locale, le chef de l’exécutif a remis en question l’efficacité de ce contrôle, alors que l’armée fait face à un problème de sous-effectif.
« Depuis plusieurs années, nous avons toujours ce problème-là d’identification des veuves. Dans ce cadre, nous avons récemment reçu une équipe de l’inspectorat général pour cette fin.
malheureusement, à chaque fois que les inspecteurs passent ici, nous avons des retombées comme celle-là. Or nous sommes dans une zone opérationnelle, on ne peut pas venir nous distraire. Ces types de problèmes affaiblissent l’armée », a asséné le commandant des opérations, rappelant que plusieurs initiatives de ce type ont été mises en œuvre sans résultats probants.
« Il est inacceptable que nous soyons dans une armée et rencontrions les mêmes problèmes jour après jour. Lors de la première visite du Chef de l’État, commandant suprême, je lui ai clairement exposé le problème des soldats fictifs…», a-t-il ajouté.
Le gouverneur regrette que cette nouvelle initiative intervient alors que le problème de personnel militaire n’est pas encore résolu.
« Tous les commandants qui étaient à Goma savent de quoi il est question. Des régiments qui n’étaient plus des régiments. Là où il fallait avoir 1200 personnes, on en a 300 ou 400. Et jamais ces gens-là n’ont été mis en cause.Nous sommes au XXIe siècle, il est temps d’arrêter ce genre de pratiques. On ne devrait plus parler de ces problèmes. Les contrôles doivent être rigoureux et sérieux », a-t-il martelé.
« Un militaire au front, actuellement engagé contre la milice de Thomas Lubanga, alliée au M23, risque sa vie. Mais si un soldat apprend que les veuves ne sont pas payées, pourquoi se sacrifierait-il ? Il se dira : « Si je meurs, mes enfants ne seront pas pris en charge ». Cela affecte directement le moral de ceux qui combattent en première ligne. Comment peuvent-ils se battre s’ils savent que, s’ils tombent, leurs veuves ne seront pas soutenues et seront traitées comme c’est le cas aujourd’hui ? Cela vise à déstabiliser toutes les opérations », a conclu le gouverneur de l’Ituri allusion faite à une manifestation projetée par les veuves en protestation contre la mesure de l’IG FARDC.
Selon l’IG FARDC, cette initiative, gérée par le Secrétariat général à la Défense, vise à obtenir une connaissance précise des effectifs, essentielle au bon fonctionnement de l’armée, en lien avec les opérations militaires en cours. Cependant, le gouverneur affirme que cette décision aura des répercussions sur le moral des soldats.
Mont Carmel Ndeo