Le gouverneur militaire de l’Ituri, une province placée sous état de siège depuis quatre ans, le lieutenant-général Johny N’kashama Luboya est rappelé à Kinshasa.
Officiellement, rien n’a filtré sur les motifs de sa convocation par la hiérarchie. Néanmoins, celle-ci coïncide avec les remous suscités par sa déclaration devenue virale sur les réseaux sociaux.
Dans cette déclaration, cet officier de l’armée congolaise, gouverneur et commandant des opérations militaires dans la province de l’Ituri a décrié l’absence d’orthodoxie dans la gestion des finances notamment dans le secteur militaire. Il déplorait les mauvaises conditions de vie des soldats au front.
« Aujourd’hui, nos militaires n’ont de quoi se nourrir que pendant 15 jours. Ils survivent avec cette ration limitée. Allez au ministère et demandez combien d’argent est réellement alloué pour les vivres. Les fonds ont été quadruplés, mais les militaires devraient avoir trois repas par jour… Quand les militaires ne sont pas payés, le grand public pense que c’est de la responsabilité du gouverneur, alors que je ne fais pas partie de cette chaîne. Je suis ici pour gérer les opérations, représentant l’armée. Mon rôle est de garantir la mise en œuvre des actions, c’est-à-dire du combat et des opérations militaires », a-t-il asséné.
Outre le détournement présumé des soldes et des rations de militaires, le lieutenant-général N’kashama a également fustigé le manque de considération envers les veuves des combattants tombés affirmant que cette situation démoralise ceux qui sont engagés dans le combat contre les groupes armés.
« Un militaire au front, actuellement engagé contre la milice de Thomas Lubanga, alliée au M23, risque sa vie. Mais si un soldat apprend que les veuves ne sont pas payées, pourquoi se sacrifierait-il ? Il se dira : « Si je meurs, mes enfants ne seront pas pris en charge ». Cela affecte directement le moral de ceux qui combattent en première ligne. Comment peuvent-ils se battre s’ils savent que, s’ils tombent, leurs veuves ne seront pas soutenues et seront traitées comme c’est le cas aujourd’hui ? Cela vise à déstabiliser toutes les opérations », a-t-il indiqué soulignant
Le Lieutenant-Général N’kashama réagissait à la décision de l’inspectorat général des FARDC, de suspendre temporairement le versement des indemnités dues aux veuves de soldats décédés lors des combats.
Dans la foulée, le Général-Major Sylvain Ekenge, porte-parole de l’armée a laissé entendre que la plupart des veuves et orphelins des militaires qui manifestent ne répondent pas aux critères.
Intervenant lors d’un briefing organisé par le ministre de la Communication et des Médias, le général Ekenge a mis en exergue l’une des dispositions légales encadrant la carrière militaire en RDC : les soldats doivent rester célibataires et sans enfants pendant 7 ans après leur formation à l’académie militaire, avant de pouvoir renouveler leur engagement.
« Mais lorsqu’ils sont en opération, ils se marient. Ce mariage est illégitime aux yeux de l’armée, qui ne le reconnaît pas, pas plus que les enfants nés de cette union », a expliqué le Général Ekenge.
Cette convocation est la deuxième en l’espace de deux mois.
Mont Carmel Ndeo