L’Assemblée nationale et la Cour constitutionnelle de la RDC ne sont pas en odeur de sainteté. La pomme de discorde entre les deux institutions congolaises se situe autour de la procédure dans le cadre du procès Bukanga Lonzo, un scandale financier qui a couté au trésor public plusieurs millions de dollars américains.
Dans cette affaire, la Haute Cour poursuit l’ancien Premier ministre, Augustin Matata, Deogratias Mutombo, ancien gouverneur de la BCC et le patron d’Africom, Grobler Kristo. Cependant, l’Assemblée nationale s’oppose à cette démarche dénonçant la violation de l’article 107 de la constitution qui dispose qu’: « Aucun parlementaire ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé en raison des opinions ou votes émis par lui dans l’exercice de ses fonctions. Qu’aucun parlementaire ne peut, en cours de session, être poursuivi ou arrêté, sauf en cas de flagrant délit, qu’avec l’autorisation de l’Assemblée nationale ou du Sénat, selon le cas. En dehors de sessions, aucun parlementaire ne peut être arrêté qu’avec l’autorisation du Bureau de l’Assemblée nationale ou du Bureau du Sénat, sauf en cas de flagrant délit, de poursuites autorisées ou de condamnation définitive. La détention ou la poursuite d’un parlementaire est suspendue si la chambre dont il est membre le requiert. La suspension ne peut excéder la durée de la session en cours ».
Dans une correspondance adressée à Dieudonné Kamuleta, président de la Cour constitutionnelle et du Conseil supérieur de la magistrature, le président de l’Assemblée nationale, Vital Kamerhe appelle cette juridiction à la stricte observance des prescrits de la Constitution du pays.
« Sans vouloir entraver le bon fonctionnement de la justice, et en adhérant pleinement à la nécessité de lutter contre l’impunité dans le respect de l’article 151 de la Construction, il ressort des débats engagés au cours de la plénière de l’Assemblée nationale tenue en date du 17 avril 2025, que l’honorable Matata Ponyo Augustin est poursuivi et jugé sans que ses immunités n’aient été préalablement levées », a écrit Vital Kamerhe.
Qualifiant l’immunité parlementaire d’un « verrou constitutionnel incontournable », le speaker de la Chambre basse du Parlement congolais invite la Cour à surseoir la procédure en cours.
« Ainsi, je vous prie de bien vouloir constater
l’existence de ce préalable, verrou constitutionnel incontournable, et demander à l’organe de poursuite près votre juridiction, qui me lit en copie, de se plier à cet impératif, garante de l’inviolabilité des représentants du peuple », a-t-il insisté.
Lors de l’audience du 23 avril, le président de la Cour, Dieudonné Kamuleta avait déclaré que l’Assemblée nationale ne peut ni donner d’injonction au pouvoir judiciaire, ni interférer dans les procès en cours.
« L’Assemblée nationale sait très bien que la teneur de l’article 151 de la constitution ne permettrait pas une telle position. L’indépendance du pouvoir judiciaire est consacrée et l’interaction entre institutions doit être respectée. Cet article dit très bien que l’Assemblée nationale ne peut ni donner d’injonction au pouvoir judiciaire, ni interférer dans les procès en cours », déclarait Dieudonné Kamuleta rappelant le principe de séparation des pouvoirs.
Jugé par défaut en raison de son absence lors de la dernière audience, Matata Ponyo Augustin, député national, élu de la circonscription électorale de la ville de Kindu, risque 20 ans de servitude pénale, 10 ans d’inéligibilité à exercer toute fonction publique, ainsi qu’une interdiction de quitter le territoire territoire national.
Sauf changement majeur, la Haute Cour rendra son arrêt le 14 mai prochain.
Mont Carmel Ndeo