Poursuivant son programme spécial du mois de mars qui consiste à célébrer les femmes exceptionnelles de la République démocratique du Congo, la rédaction de Foxtime.cd s’est entretenue ce jour avec l’honorable Colette Tshomba qui a accepté de parler de son parcours professionnel respectable.
Pouvez-vous vous présenter honorable Colette Tshomba?
C’est toujours un exercice difficile de se présenter car, de manière générale, parler de soi-même n’est pas toujours aisé.
Je suis journaliste de profession, et femme politique par passion pour mon pays. A côté de ces deux casquettes principales, je suis chef de travaux à l’Institut Facultaire des Sciences de l’Information et de la Communication (IFASIC) car j’adore enseigner et je suis chef d’entreprise, à la fois dans mon domaine de formation c’est-à-dire le journalisme et dans d’autres secteurs d’activités. J’ai ainsi fondé et lancé un journal quotidien, (UHURU) et un magazine féminin (AWA). Je suis également entrepreneure.
Citoyenne et engagée dans le combat pour la promotion des droits de la Femme, je suis membre fondatrice de deux ONG de développement. La première, SOLPAT, vise à apporter un soutien matériel, financier et environnemental à la population. Et la deuxième, « MAMA NDE MOBATELI » qui a pour but d’aider les femmes, à atteindre l’autonomisation, avec l’octroi des micro-crédits, des formations pour la gestion quotidienne de leurs revenus et la formation professionnelle dans divers métiers (informatique, l’artisanat, l’esthétique, etc.)
Votre parcours professionnel ?
Oui, mon parcours professionnel, commence alors que je suis encore aux études au sein de ce qui était alors l’ISTI aujourd’hui IFASIC. Nous avons été sélectionnées après une série de test pour intégrer l’OZRT actuellement RTNC en qualité de téléspeakerine. Ensuite, j’ai poursuivi mes études et gravi les échelons au sein de la rédaction. J’ai fait ce qui est l’essence même du métier de journaliste, les reportages, les interviews, avant de présenter le journal TV de 20 heures au milieu des années 1990. J’ai travaillé pour la chaîne nationale jusqu’au début des années 2000. Mais j’ai également travaillé dans plusieurs médias en France et en Afrique du Sud. Au moment des négociations politiques de Sun City en 2002, auxquelles j’ai pris part en tant que journaliste, j’ai décidé de fonder mon propre media. C’est le journal Uhuru et après j’ai lancé le magazine AWA. Par la suite, j’ai fait mes premiers pas en politique, en faisant partie des députés nationaux cooptés pour la période de Transition (2003-2006) pour le compte de la société́ civile. A l’époque, les députés avaient été choisis par le pouvoir politique car il n’y avait pas eu d’élections depuis des années.
J’ai été par la suite élue députée nationale pour les législatives de 2006, 2011, et 2018 dans la circonscription de la Funa. De 2006 à 2008, j’avais été nommée Vice-ministre en charge des Congolais de l’Étranger (de février 2007 à février 2010). Au cours de la dernière législature, j’avais été élu rapporteur adjoint au sein du bureau de l’Assemblée nationale. J’ai occupé aussi d’autres fonctions comme membre du conseil d’administration de la CVM (La Congolaise des Voies Maritimes).
Pour remonter plus loin dans mes souvenirs, j’ai pris part aux consultations nationales appelées « MOBUTU – PEUPLE », alors que j’étais encore étudiante, et ce dès 1990. Et plus tard, en 1997, j’ai travaillé comme conseillère en matière de communication du général Mayele, alors vice-premier ministre en charge de la Défense et la Sécurité nationale et chef d’État-major général des Forces Armées Zaïroises. Aujourd’hui je me définis comme une femme de presse, engagée en politique, et comme enseignante par vocation car j’aime d’abord apprendre moi-même et transmettre aux autres.
Quelles sont les tâches quotidiennes que menez-vous au service de la communauté ?
Je dirai que ma tâche quotidienne au service de la communauté est qu’en tant qu’enseignante, je partage le savoir avec mes étudiants, futurs cadres et décideurs. Ce qui est un service que je rends à la communauté mais également un devoir vis-à-vis de la communauté à laquelle je dois rendre tout ce qu’elle m’a donné.
Mais, dans un autre registre, j’ai parlé de deux grandes réalisations qui me tiennent à cœur dans lesquelles, je suis pleinement investie depuis des années. Je suis membre fondatrice de deux ONG, SOLIDARITE et PAIX pour Tous (SOLPAT en sigle) et de « MAMA NDE MOBATELI ».
Au sein de la SOLPAT, nous travaillons sur le segment du développement communautaire. Nous encadrons la population défavorisée ou démunies notamment les filles mères, les orphelins, les veuves, les malades etc. Nous travaillons avec ce groupe cible sur le plan social, psychologique, sanitaire, éducationnel, sur des objectifs du développement.
Nous les sensibilisons aussi sur les problématiques liées à l’environnement et à l’assainissement de leur milieu.
Enfin, au cours de nos réunions nous insistons aussi pour promouvoir la paix, car sans la paix, il ne peut y avoir de développement.
Tandis qu’au sein de l’ONG « MAMA NDE MOBATELI » nous travaillons plus spécifiquement sur l’autonomisation des femmes. Nous mettons sur pied des programmes afin de les aider à sortir de la pauvreté, avec l’octroi des micro-crédits pour aider à se lancer dans une activité de survie. Nous les encadrons dans la gestion de leurs finances et l’organisation de leurs ressources.
A côté de ces activités, « MAMA NDE MOBATELI » dispose d’un Centre de Formation Professionnelle, lequel organise des formations professionnelles dans divers domaines tel que la fabrication des sacs artisanaux, des yaourts, comment faire des Make-up, l’initiation à l’informatique ou à l’audio-visuel.
Est-il facile pour vous de gérer vos activités professionnelles avec votre vie familiale ?
Dieu merci, mes enfants, j’en ai trois, sont tous grands et indépendants aujourd’hui. Je ne veux pas dire que je cesse d’être « maman ». On l’est toute sa vie mais avec des degrés d’implication un peu moindres du fait qu’ils ont grandi. Toutefois, j’ai eu à l’instar de beaucoup de femmes, des problèmes pour concilier les deux, surtout quand les enfants sont encore petits.
En ce qui me concerne, outre les contraintes d’agenda professionnel, je devais aussi gérer la distance et les voyages. Pendant un moment, mes enfants étaient, pour certains en Afrique du Sud et pour d’autres en France. C’était très compliqué et à cette époque, il n’y avait pas WhatsApp ni les autres réseaux sociaux (c’est l’enseignante qui parle).
Pour terminer, je dirai que ce n’est pas facile, mais avec une bonne organisation, beaucoup de flexibilité et de compréhension, on peut s’en sortir et cela a été mon cas, et je ne pense pas qu’il soit isolé.
Surnommée la Reine de la Funa, l’honorable Colette Tshomba pense que l’émancipation de la femme passe par son instruction qui est la première pierre de l’édifice !
Le combat est déjà engagé et ce, depuis longtemps. Les femmes congolaises n’ont pas attendu la conférence de Beijing en 1995 pour revendiquer leur droit ou une meilleure représentativité dans la vie politique ou économique. Les femmes congolaises ont conscience de leur rôle dans la société et de ce qu’elles doivent faire pour que nous arrivions à une société purement égalitaire en termes de droits entre l’homme et la femme. Je veux dire par là, qu’il nous faut arriver à une société qui donne l’égalité de chances à nos enfants qu’ils soient un garçon ou une jeune fille. C’est là que tout commence, au sein de nos familles même. Dans une société où l’on décide d’envoyer un garçon à l’école et non sa sœur parce c’est une fille, vous aurez beau faire toutes les politiques publiques en faveur des femmes « politiques » plus tard, mais, le mal ne sera jamais traité car ne l’ayant pas été à la racine.
L’émancipation de la femme passe par son instruction qui est la première pierre de l’édifice. L’instruction conduisant à l’autonomisation des femmes, ce qui leur ouvrira toutes sortes de perspectives.
Mais n’oublions pas que l’éducation a un rôle primordial dans ce parcours et celui-ci relève de la cellule familiale et non de l’état. En RD Congo, les femmes ont déjà compris quels étaient les défis à relever et elles s’y attellent.
Frantz FANON disait « chaque génération doit, dans une relative opacité, affronter sa mission : la remplir ou la trahir ».
Nos mamans ont, en quelques sorte, accompli leur mission en nous envoyant à l’école alors que ce n’était pas facile. A nous de faire notre part en arrachant l’égalité des droits.